Je reçois de nombreuses questions à propos de mon métier, notamment sur mon parcours et mes choix. De plus, il est vrai que j’accueille un certain nombre de stagiaires dont beaucoup souhaitent s’orienter vers cette carrière. J’ai toujours beaucoup de choses à dire sur le sujet et j’espère que cet article permettra de vous donner une image plus claire de la réalité. En fait, malgré le titre qui pourrait être trompeur, je vais non pas vous expliquer en détail « comment devenir luthier » mais plutôt « pourquoi (ne pas) devenir luthier ».
Comment devenir luthier en général
En fait, devenir luthier est très simple : ce n’est pas un métier réglementé. C’est pourquoi n’importe qui peut s’intituler luthier, pas besoin de diplôme, pas besoin d’attestation de savoir-faire, pas besoin de concours. Il suffit en fait d’avoir quelques outils et un peu de culot pour lancer sa propre entreprise.
Mais dans la réalité, le chemin habituel de la plupart des luthiers est de passer par une école (publique ou privée). Dans celle-ci ils pourront acquérir les compétences de bases qui ne seront que les prémices de leur parcours professionnel.
Chacun d’entre nous aura un chemin très différent pour s’approprier les connaissances nécessaires. D’ailleurs, il serait bon déjà de se poser la question dans un premier temps : qu’est-ce que je veux faire en tant que luthier ?
Les stages de lutherie à l’atelier
Découvrez les stages à l’atelier pour découvrir l’univers de la lutherie et créer votre propre instrument.
-
Stage pour découvrir la lutherie
à partir de 350,00€ TTCVoir les options Ce produit a plusieurs variations. Les options peuvent être choisies sur la page du produit -
Stage intensif de lutherie
à partir de 1815,00€ TTCVoir les options Ce produit a plusieurs variations. Les options peuvent être choisies sur la page du produit
Quelles sont les qualités d’un futur luthier ?
C’est une question qui revient assez souvent, et c’est pourquoi je voulais en parler. Je suppose que tout le monde aura un avis différent sur la question, mais voici en tout cas mon avis sur les qualités fondamentales nécessaires. Je ne vais pas aborder la question des compétences, car honnêtement, rien d’autre ne prépare au métier. Et en même temps, toute compétence supplémentaire est bonne à prendre.
Passion
Elle sera nécessaire quoi qu’il en soit car vous allez devoir aimer ce que vous faites. Vous aurez ainsi assez d’énergie pour poursuivre cette quête sans faiblir, et affronter la routine d’un apprentissage rigoureux et exigeant.
Patience
La patience est sûrement une des qualités clef de la lutherie. Très peu adaptée au monde moderne il s’agit pourtant d’une qualité très importante qu’il ne faut pas sous estimer. Observer, comprendre, être attentif et observer chaque geste, chaque courbe, revenir inlassablement sur son travail et aller plus loin.
Persévérance
La persistance, la persévérance, il faudra bien sûr en posséder beaucoup. Car je peux vous l’annoncer dès maintenant, vous allez être déçu, vous allez échouer beaucoup… Non pas que vous êtes inférieures, mais comme le dit le dicton : « Le maître a échoué bien plus que l’apprenti n’a jamais essayé ». Il vous faudra vous aussi vous relever et vous remettre en selle.
Précision
La lutherie va vous demander de penser la précision à une autre échelle. Il n’y a guère de place pour l’approximation et même si l’on dispose parfois d’une certaine tolérance, votre œil et votre main devront rapidement apprendre à travailler au 1/10 voir même en dessous.
Perfection
La perfection ne sera jamais atteinte, je peux déjà vous l’annoncer. Mais vouloir l’achever sera toujours une motivation qui devra vous porter. Faire de votre mieux, faire mieux que le mieux que vous pouvez faire.
Polyglottisme
Je ne sais pas si c’est une compétence ou une qualité… Mais soyez ouvert sur le monde, soyez ouvert sur les langues, le voyage et les rencontres. Sinon vous vous mettez d’énormes bâton dans les roues. Maîtrisez l’anglais, la langue professionnelle par excellence qui vous ouvre un accès à une une source de connaissance presque inépuisable, des opportunités et des contacts autour du monde.
Si vous possédez ces qualités, vous avez sûrement de quoi devenir, sans postillonner, un luthier professionnel. Si vous ne les possédez pas, rien ne vous empêche en tout cas de prendre le temps de les développer.
Le parcours du luthier
C’est vrai, que pensez-vous que fait un luthier dans son quotidien ? Je veux dire réellement…
Pensez-vous qu’il existe un archétype sur lequel chacun se calque afin de trouver le chemin de la réussite professionnelle ? En fait, oui il en existe un, il s’agit un peu même que le calquage familial ou ce que l’on appelle la transmission. C’est à dire que l’ancienne génération transmet à la nouvelle ce qu’elle a construit et le fait passer ainsi au fil des ans. Un schéma qui a fonctionné parfaitement pendant des siècles, mais est-ce qu’il est encore valable dans le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui ? Autant la lutherie est un métier qui véhicule un grand respect des traditions et de la préservation du patrimoine, il faut néanmoins s’adapter à l’évolution frénétique du monde moderne.
Il est normal d’être fortement influencé par nos maîtres, leurs valeurs et habitudes. Il est toutefois important de pouvoir s’en extraire et s’approprier totalement ces différentes influences pour les faire correspondre à notre propre personnalité. De cette manière, il sera bien plus facile de trouver sa place dans le monde de la lutherie et surtout de s’y sentir bien.
Comment gagner sa vie en tant que luthier
En fait, lorsque nous choisissons une carrière, il est sûr primordial d’aborder l’aspect de comment gagner assez d’argent pour survivre… Et encore mieux, pour vivre confortablement. J’entends souvent, la lutherie c’est fantastique, c’est un métier-passion… En d’autres termes, on se fait plaisir et on vit ses rêves à longueur de journée en travaillant au calme dans un atelier qui sent bon le bois et la colle chaude. Passant surement nos journées à inlassablement observer les différentes formes qui s’enchaînent dans une volute tout en se tenant le menton d’un air songeur.
La passion c’est bien, mais selon moins ce n’est pas le métier qui va vous remplir de passion. En fait, c’est plutôt la passion que vous avez en vous, la ténacité, la volonté et le courage qui vont vous permettre de continuer sur le bon chemin. Car comme sur n’importe quelle route, les obstacles seront nombreux, et je dirais même qu’ils sont bien plus importants sur celle-ci. Mais rien de dramatique non plus…
Les différentes activités du luthier
Dans de nombreux cas, la lutherie est un métier très individualiste. C’est aussi une profession très personnelle, et il existe de nombreuses façons de l’exercer. Voici quelques manières qui vont permettre à un artisan de gagner sa vie :
- Fabrication d’instruments
- Fabrications d’accessoires
- Réparation
- Restauration
- Montage
- Réglages
- Reméchage et entretien d’archet
- Location de matériel
- Négoce d’instruments et accessoires
- Expertise
- Enseignement
- Consulting pour les industriels
- Agent commercial
- Et le reste, qui n’a de limite que l’imagination.
Comment devenir luthier aujourd’hui ?
En fait, comme je l’ai dit précédemment, il faudra presque obligatoirement passer par une école spécialisée (je ferai une liste dans un autre article à l’occasion).
Ces écoles ne vont absolument pas vous transformer en luthier. Elles vous donneront simplement quelques bases qui vous permettront éventuellement d’accéder à des stages, ou à un premier emploi dans lequel d’autres artisans voudront bien vous transmettre leur savoir. Certaines personnes décident de se lancer seules dès leur sortie de l’école, mais il s’agit d’une initiative bien plus risquée.
Les outils de l’apprenti luthier
Quelques outils qui vous seront très utiles pour commencer votre apprentissage de la lutherie.
-
Moule et gabarits pour violon
252,00€ TTCVoir les options Ce produit a plusieurs variations. Les options peuvent être choisies sur la page du produit
Les bons et les mauvais côtés d’une école de lutherie
Comme je le disais, les écoles de lutherie ne donnent pas toutes les clefs pour réussir. D’ailleurs, la plupart d’entre elle ne vous transmettront en fait même pas les bonnes clefs pour vous rendre employable, ce qui est assez aberrant. Avant de choisir l’une d’entre elle, il est bon de réfléchir à ce que vous cherchez exactement et comprendre ce que vous apprendrez dans chaque établissement. En fonction de votre personnalité et aussi de vos objectifs.
De manière générale, sans sortir de la bulle de l’école, vous aurez du mal à vous rendre compte de la réalité économique à laquelle vous devrez ensuite vous soumettre.
Ce que recherche un employeur
Un employeur recherche bien évidemment quelqu’un de sérieux et de motivé, mais ce n’est pas tout, il y a certaines compétences qui seront absolument requises pour décrocher un poste dans un atelier. Voici selon moi les notions vraiment importantes à acquérir lors de son apprentissage :
- Pouvoir effectuer un montage complet des violons, altos et violoncelles à un standard professionnel et assez rapidement.
- Savoir mener des réparations et restaurations de base de manière indépendante avec un rythme correct.
- Être en mesure de pouvoir effectuer les manipulations de base sur un instrument (changement des cordes, accordage, etc…).
Ce que ne recherchent pas les employeurs…
…et que toutes les écoles passent leur temps à enseigner : comment fabriquer des instruments.
Bien sûr, il est important de savoir comment construire un violon, un alto ou un violoncelle. Cela permet d’apprendre à se servir de nombreux outils, comprendre comment toutes les pièces s’assemblent, de faire en sorte d’acquérir assez de compétences en travail du bois. Et même si montrer votre violon aura beaucoup plus de valeur que le plus beau et complet des Curriculum Vitae, vous ne serez qu’en de très rares cas embauchés pour faire ce travail. Pire encore, de nombreux contrats de travail vous empêcheront de construire vos propres instruments.
Attention, certains cursus vous font construire plusieurs instruments en blanc, sans montage, sans vernis…
C’est pourquoi, je vous conseille de faire attention au programme de votre école avant de la choisir. De même, vous pourrez toujours compléter par des stages durant votre formation ou du travail personnel. C’est d’ailleurs pourquoi je propose des stages de formation professionnelle.
[blog_posts ids= »24931″]
Comment choisir son école
Si je devais vous donner des conseils d’après mon expérience, voici quelques points qui me semblent essentiels dans le choix d’une école :
- Ne faites pas une école dans votre pays d’origine. Profitez-en pour apprendre une autre langue, vous enrichir d’une autre culture, et faire des rencontres internationales.
- Nouez des liens avec vos camarades. Tissez des liens avec vos camarades, c’est ici que commence votre réseau professionnel.
- Choisissez une école avec un programme complet. C’est à dire une école qui vous fait découvrir tous les aspects de la lutherie contemporaine : la fabrication, la réparation, la restauration, le montage, le vernis, si possible des expériences professionnelles.
- Préparez votre projet d’embauche ou de création bien avant d’obtenir le diplôme. Préparez vos réseaux, adaptez vos connaissances et affûtez vos outils.
Quelques mots pour le futur luthier
Si vous passez la porte des luthiers près de chez vous (mais ceux qui sont loin aussi je vous rassure), vous aurez très souvent des réactions assez austères si vous faites part de votre projet professionnel. Et c’est tout à fait normal, j’ai eu les mêmes réflexions à l’époque et je les entends encore aujourd’hui de la part de collègues.
Pour être direct, il y a trop de luthiers. Il y en a en tout cas de plus en plus, c’est ce que l’on entend. Et de nos jours, c’est encore plus délicat, un monde très concurrentiel, entre Internet et ses cyberstores tentaculaires, les amateurs, la multiplication des ateliers dans les agglomérations, de moins en moins de violonistes, d’altistes et de violoncellistes…
Si vous souhaitez mieux comprendre le marché de la facture instrumentale en France. Je vous invite à lire cette étude d’une centaine de pages qui traite du sujet de manière approfondie : https://www.csfi-musique.fr/item/131-grande-etude-economique-2017.
Comment devenir luthier malgré tout ?
Si je vous ai fait peur, c’est tant mieux car même si ce n’est pas forcément si terrible j’ai tout de même envie de vous faire prendre conscience d’une certaine réalité. Lisez, renseignez-vous et faites vous votre propre idée. Confrontez la ensuite à ce que vous voulez faire, vous êtes le seul juge.
Toutefois, il ne faut pas baisser les bras, après tout, il faut être persévérant. Et ce sera votre premier test, si vous abandonnez dès que la moindre difficulté apparaît, je pense qu’il est plus sage d’opter pour une autre voie. Autrement vous ne pourrez certainement pas vous épanouir.
Je vais essayer dans le futur d’aborder d’autres sujets qui permettront d’aborder le sujet de la lutherie de manière plus économique. En vous présentant par exemple un prévisionnel simplifié d’un atelier de lutherie.
D’ici là, si vous avez des questions supplémentaires, je vous invite à en discuter sur les réseaux sociaux, m’envoyer un e-mail ou de m’appeler directement.